SAPIN

Dans plusieurs nations du nord, j’ai souvent entendu des ainés parler du sapin avec beaucoup d’amour. Certains ont gardé un lien étroit avec cet arbre depuis leur tendre enfance. Son odeur rappelle les bons moments passés sous la tente, avec le chaudron de branches qui mijote lentement sur le poèle à bois. Ça sent le mitishan (le sweat-lodge) quand le sol de la tente est recouvert de branches.

Dans les langues d’origine algonquienne, sapin, ça veut dire ‘‘arbre’’. Il y a plusieurs générations, les enfants de la forêt dessinaient un sapin, pour représenter un arbre. Avant qu’on leur enseigne par assimilation qu’un dessin d’arbre, c’est un feuillu avec des pommes…

Les usages médicinaux, pratiques, alimentaires et spirituels du sapin sont vraiment nombreux. Avec l’achillée et le bouleau blanc, le sapin fait partie des plantes de base les plus importantes pour la vie en forêt. L’avantage du sapin, c’est que sa médecine est disponible en tout temps, durant les quatre saisons.

En ces temps de Covid, la médecine du sapin en est une précieuse à connaitre. Parmi ses meilleures propriétés :

• boost du système immunitaire, par sa très forte concentration en vitamine C naturelle (hautement assimilable et adaptée à nous, gens du nord)

• protection des poumons, grâce à ses huiles essentielles antivirales

• guérison des plaies, avec à sa résine antiseptique et bactéricide

TRAITEMENT PULMONAIRE

Pratiquement toutes les personnes qui ont suivi une formation avec moi ont reçu cet enseignement de base : décoction au sapin. Ce remède simple à faire peut être utilisé de plusieurs façons :

• petit bain de vapeur

• bain complet, bain de pied

• assainisseur d’air

• décoction à boire

Préparation : une branche de sapin de la longueur d’un demi-bras pour un bon chaudron d’eau.
Préparer deux chaudrons.

Couper les aiguilles en petits morceaux, pour que la médecine se libère dans l’eau.
Laisser mijoter un temps, pour libérer les huiles essentielles dans l’air.

Le petit bain de vapeur se fait en se plaçant au-dessus des vapeurs de la décoction, avec une grande serviette sur la tête, comme pour se faire une petite tente. Pendant que le 2e chaudron continue de mijoter, respirer les vapeurs du premier chaudron (qu’on aura retiré du feu). Quand le premier chaudron ne fait plus de vapeur, le remettre sur le feu et prendre le 2e chaudron. Cette technique permet de faire le traitement en continu, sans devoir attendre à nouveau l’ébullition et les vapeurs, dans une serviette devenue humide. Respirer les vapeurs de sapin aide à guérir et à protéger les poumons, directement à la source. Respirer aussi souvent et aussi longtemps que vous en avez envie.

Bain complet, bain de pied : à force de bouillir et de re-bouillir, l’eau de la décoction devient de plus en plus concentrée. Une fois le traitement de bain de vapeur terminé, l’eau du premier chaudron peut servir à se faire un bon bain de pied réconfortant. Pour les jeunes enfants qui ont du mal à faire le bain de vapeur, la décoction peut simplement être versée dans l’eau d’un bain chaud. La médecine du sapin entrera par la peau et par les poumons.

Assainisseur d’air : pendant que les aiguilles de sapin mijotent sur le poèle, les huiles essentielles libérées dans l’air assainissent la pièce des microbes et virus ambiants. Pas mal plus sain et naturel qu’un ‘‘febreeze’’ ou un ‘‘plug-in’’ à senteur artificielle de perturbateurs endocriniens…

Décoction à boire : le premier chaudron peut servir à mettre dans le bain ou à assainir l’air, et le 2e chaudron peut servir à se soigner en interne, pour doubler les chances de guérison. Apport de vitamine C direct. Bien sûr, plus l’eau a mijoté, plus la décoction est forte au goût. Boire toute l’eau en dedans de 24 heures pour une nette diminution des symptômes comme la perte d’énergie, la toux, les poumons douloureux ou le nez qui coule.

POUR TOUS

La décoction d’aiguilles de sapin est un remède pour tous : enfants, femmes enceintes et adultes de tout âge. Pour les femmes enceintes par contre (comme pour n’importe quel traitement à base de plante) la modération est de mise: en très grande quantité, le sapin consommé en interne peut être abortif.

C’est collant!! Un cerne brun et épais se formera sur les bords du chaudron qui a servi à la décoction. Pour le nettoyer, simplement prendre un corps gras (beurre ou huile végétale) pour frotter doucement.

ET ENCORE!

On peut manger directement les aiguilles de sapin ou manger la résine pour une bonne haleine, un petit boost d’énergie et un apport direct en vitamine C. Voir tous les usages du sapin dans la monographie complète, dans le livre des Arbres (pour ceux qui ont le livre de base).

Apprendre à bien identifier le sapin pour le différencier de l’épinette, de la pruche ou de l’if du canada (qui lui est toxique).

L’idéal est de faire le traitement avec du sapin frais, mais pour ceux qui vivent en ville, il est possible de se faire des provisions d’aiguilles de sapin pour se soigner à la maison. L’important est de bien conserver ses aiguilles sèches à l’abri de la lumière, de la chaleur et de l’humidité, sans quoi elles perdent rapidement leur médecine.

Demandez à l’Arbre quelle branche il souhaite vous offrir. Donnez avant de prendre. Remerciez. Respect pour l’Arbre,

Prenez soin de vous.

La Métisse

Comparatif de différents conifères:

photo 1 : branches de sapin provenant de trois sapins différents. Le premier pousse en forêt, en compétition pour l’eau et le soleil. Le 2e pousse à l’orée du bois, avec plus de soleil. Le 3e vit au bord d’un terrain résidentiel, sans compétition, avec un maximum de soleil et d’eau, et fournit donc beaucoup d’aiguilles.

photo 2: branche de sapin très fourni et branche d’épinette blanche. Les deux arbres sont souvent confondus, surtout quand la branche de sapin ne ressemble pas à la branche typique, plate et dégarnie que les ‘‘grands connaisseurs’’ voient habituellement…

photo 3: trois conifères souvent confondus, branche d’épinette, sapin et pruche

photo 4: les aiguilles de sapin ont le bout arrondi, celles de l’épinette sont pointues